Te revoilà saison maudite
Avec tes yeux gris en chagrin
Trop pareils à mon frère Alain
À la seconde où il nous quitte
Et tout mon être se souvient
La Camarde jamais ne me quitte
L’odeur du soufre est son parfum
Dans son silence carmélite
Depuis je porte en toi mon frère
Une meurtrissure mal guérie
Tu m’as tué comme toi mon frère
Tu m’as suicidé moi aussi
Je suis une âme sans-abri
Que l’horreur prive de lumière
L’automne sombre encore noircit
Prélude à l’éternel hiver
Tu nous as quittés au printemps
Ce soir tu souffles tes bougies
Et c’est toujours à ce moment
Que mon cœur soudain s’assombrit
Tu ne connais pas mes enfants
Tu n’es pour eux qu’un pur esprit
Dans deux espaces différents
Je dois vivre avec mes deux vies
Sois sans crainte je ne t’en veux pas
En fait je n’en veux à personne
De la naissance jusqu’au trépas
L’injustice partout résonne
Tu aurais pu naître là-bas
Sous les bombes de Washington
Je sais bien qu’on ne choisit pas
Quand le cri de la mort résonne
J’ai beau repenser tes sourires
Revoir tes jeux tes yeux rieurs
Replonger dans mes souvenirs
Ils alimentent ma douleur
Tu m’excuseras si pour t’écrire
J’ai mis des années et des heures
Trop peu de mots trop de soupirs
J’ai l’alphabet noyé de pleurs
Et si quelques fois je t’oublie
Rarement plus qu’un bref instant
C’est une affaire de survie
De m’évader de temps en temps
Par l’art ou par la poésie
Par la musique grâce aux enfants
Tu n’es parfois que nostalgie
Je reviens parmi les vivants
Mais j’habite ma solitude
Je sais qu’on ne peut plus m’aimer
Je n’ai qu’une seule certitude
Que jamais je ne t’oublierai
Gilles St-Onge