Le bien, le bon, le beau

 Au-delà de moi-même de mes vagues désirs

Sur une toute autre rive vous y êtes aussi

Sur l’océan des jours se croisent les navires

De milliers d’horizons et de tout acabit

Chacun de ces vaisseaux transporte dans ses cales

Sa cargaison de soi tissée dans son histoire

Ballotés par les vents qui soufflent la grand-voile

Battant pavillon blanc battant pavillon noir

Et chaque capitaine se tenant à la barre

Cherche son Amérique ou son El Dorado

Évitant comme il peut les récifs barbares

Sous le miroir des eaux qui couvrent les égos

Certains sont flibustiers et font cap sur le nord

Quand les pieux matelots cherchent à s’en éloigner

Eux qui tendent la main en arrivant au port

Aux coffres remplis d’or ils préfèrent l’amitié

Ils poursuivent cette île qu’on surnomme « Le bien »

Là où dit-on les lys ont un parfum de paix

À l’abri des démons cachés dans les instincts

Qui tirent le cœur des hommes dans un brouillard épais

Un pays sans tempête, sans vagues et sans chagrins

Ou l’ermite en silence attend sur son sommet

Dans l’espoir infini d’un éternel matin

Qui ouvrirait les portes d’un paradis parfait

Les galions du grand large ne sont pas faits pour tous

Et plus nombreuses sont les petites goélettes

Qui préfèrent les côtes à l’abri des secousses

Et la fraîcheur des fruits des nouvelles cueillettes

Les matelots pressés le plus souvent des mousses

À l’assaut du plaisir y vivent d’amourettes

De bouteilles qui se vident de jupes qui se retroussent

Le temps d’une nuit blanche le temps d’une allumette

La traversée du monde est un trop long voyage

Ils aiment les escales surtout les permissions

Quand l’horizon devient le seul paysage

Un vertige les trouble et l’ennui les confond

Qui donc d’ailleurs voudrait s’asseoir sur un nuage

Toute une éternité avec pour seule chanson

La plainte de la lyre aussi morne que sage

Ils prennent dans l’ici ce qui leur semble bon

Mais ils ont vite fait le tour de l’archipel

Et les plaisirs jaunissent comme l’œil de l’ivrogne

Et l’ombre du pirate au feu d’une chandelle

Vacille dans le soir d’une lugubre Pologne

Soudain ils ne rient plus des vielles ritournelles

Grivoises et provocantes et les cœurs se renfrognent

Quand s’épuise le bon le mauvais se révèle

Et es matins ne sont plus jamais sans vergogne.

Un peu partout sur l’onde portées par les courants

Des coquilles de noix qui naviguent au hasard

Suivent les albatros ou les blancs goélands

Sans chercher l’absolu ni aller nulle part

Leurs voiles sont modestes et leur voyage lent

Ils aiment s’attarder ils veulent entendre et voir

Et le chant des baleines et les couleurs du temps

La mélodie du monde sur un clavier d’ivoire

En cherchant l’univers ils trouvent l’infini

Et les étoiles au ciel sont des bougies de fête

Leurs âmes sont des coraux qui luisent dans la nuit

Ils pêchent la beauté comme d’autres la crevette

À la lueur du jour l’azur qui se déplie

Dévoile un parchemin brodé de découvertes

Le voyageur jette l’encre et toute sa folie

Et les fous de Bassan l’appellent le poète.

Publié par

Le poète insoumis

Gilles St-Onge : Né à Montréal en 1964. Poète autodidacte. Il tient le blogue « Le poète insoumis » sur lequel il propose une poésie à la fois engagée, intimiste et critique.

3 réflexions au sujet de “Le bien, le bon, le beau”

  1. « Chacun de ces vaisseaux transporte dans ses cales

    Sa cargaison de soi tissée dans son histoire

    Ballotés par les vents qui soufflent la grand-voile

    Battant pavillon blanc battant pavillon noir

    Et chaque capitaine se tenant à la barre

    Cherche son Amérique ou son El Dorado

    Évitant comme il peut les récifs barbares

    Sous le miroir des eaux qui couvrent les égos »
    J’adore ce passage ! Très beau poème; j’aime l’analyse de la vie et le rôle du poète . Cette première découverte et votre encart de présentation m’ont donné envie de m’ attarder plus sur vos rivages

    Aimé par 1 personne

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