La retraite du Lion

                I

L’été déjà se meurt

Elle est loin mon enfance

Les feuilles de mes branches

Ont perdu leur verdeur

 

Elles tombent en silence

Comme ont fanées mes fleurs

Paisiblement sans heurt

Dans une douce violence

 

Et le poids de mes os

Et le poids de mes nuits

Et le poids de mes cris

Sont le poids de mes mots

                   II

Sous le grand chapiteau

Du cirque de la vie

Un vieux lion aigri

Ne joue plus au cerceau

 

Il quitte les tréteaux

Les « follow spots » aussi

Sa crinière prend du gris

On ne craint plus ses crocs

 

Et son âge ramène

Ses instincts de savane

La meute qui s’effane

Des poids morts qu’elle traîne

 

La nature souveraine

Est une caravane

Un défilé insane

Une course inhumaine

 

Une sombre caverne

Servira de refuge

Loin de ceux-là qui jugent

Sa fourrure trop terne

 

Le vieux lion porte en berne

Des hiers qui le grugent

Ses rêves et leurs grabuges

Les espoirs qui le bernent

 

Et reclus en son âme

Tente de retrouver

Tout ce qu’il a été

Tout ce qui le condamne

 

Ni personnage infâme

Ni une sainteté

Il vivra isolé

Portant seul ses blâmes

                  III

L’été déjà est mort

Mon automne s’avance

La meute se distance

Je vois venir mon sort

 

Et même s’il reste encore

Du temps, de l’espérance

J’entends la résonnance

Du temps qui s’évapore.

 

Mes vers sont le prélude

D’un si mince recueil

La mort de cet orgueil

Dont j’avais l’habitude

 

Je sais ma finitude

Mon arbre se défeuille

Je connais ce cercueil

Qu’on nomme solitude

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Publié par

Le poète insoumis

Gilles St-Onge : Né à Montréal en 1964. Poète autodidacte. Il tient le blogue « Le poète insoumis » sur lequel il propose une poésie à la fois engagée, intimiste et critique.

Une réflexion sur “La retraite du Lion”

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.